Comment évalue-t-on la pensée d’un écrivain ?
La question qui hantera toute sa vie l’homme de la Haute Engadine trouve justement ici toute sa valeur. Et c’est de ce point dangereux que se lance Boley : quelle fut la teneur de la relation de Friedrich et Elisabeth Nietzsche ? Quels en furent les remous, les passions, les accidents et en somme le tragique ?
L’auteur nous précipite de plain-pied dans la famille Nietzsche. Ce microcosme protestant étriqué digérant qu’à peine la mort du patriarche, pasteur devenu fou de maladie, d’où pourtant semble s’élever un enfant artiste. Le petit Nietzsche fait des étincelles dans ce foyer plein de remords. Aux premières loges de son envol, sa mère et surtout sa sœur. A laquelle il dédiera des poèmes, des morceaux musicaux, et donc aussi sa première vie : pieuse, disciplinée, académique.
Comment alors cet amour filial, fraternel, s’est-il donc autant métamorphosé ? Parce que Nietzsche aura découvert l’amour de la pensée. Celui qui ne nécessite aucune dépendance, aucune forme de morale. Il aura découvert les Grecs et Schopenhauer, Carmen et Lou Andreas-Salomé. Une nouvelle famille qu’il aura élu loin de tout, du haut de sa solitude.
Boley raconte avec émotion comment Nietzsche deviendra ce qu’il est, malgré la pesanteur de sa sœur Elisabeth. Et comment celle-ci se vengera de l’esprit libre qu’il fut en le rapetissant, le faisant devenir de nouveau ce petit enfant chétif et malade, qu’elle aura aimé toute sa vie.