On en voit souvent de ces livres inédits sortis de derrière les fagots, fragments éparses et autres manuscrits refusés par les éditeurs du vivant de l’auteur (et ce, parfois, pour de bonnes raisons). Alors, quand on nous annonce qu’on publie le dernier roman inachevé de Don Carpenter, on est en droit de ressentir un peu d’appréhension. En lisant la postface de Jonathan Lethem, qui a édité le roman, on est déjà un peu rassuré : le livre était quasiment terminé et il n’y a pas eu grand chose à réviser. Puis, dès les premières pages, il devient rapidement évident qu’on a sous la main un grand roman de Carpenter.
Un dernier verre au bar sans nom, c’est l’histoire d’une bande d’écrivains en devenir sur la côte ouest américaine des années 50. Il y a d’abord Jaime, pleine de talent, mais qui peine à trouver le sujet de son premier roman. Charlie, qui revient de la guerre de Corée, sait parfaitement ce dont il veut parler mais il trouve difficilement les mots pour écrire son grand roman de guerre. Les deux amoureux feront la connaissance d’autres écrivaillons en quête de gloire, comme Dick Dubonet, dont les nouvelles recueillent un certain succès auprès du lectorat de Playboy, ou encore le cambrioleur Stan Winger, qui va se découvrir un certain talent pour le polar. Loin des milieux littéraires de la côte est, le groupe va suivre son petit bonhomme de chemin avec plus ou moins de naïveté, entre travail acharné, soirées alcoolisées, succès et désillusions. Au final, avec l’humour et les personnages attachants qu’on lui connaît, Don Carpenter signait là un de ses plus beaux romans depuis Sale temps pour les braves.