Un jeune Turc effectue son service militaire dans un coin reculé du pays. Lors d’un de ses tours de garde lui apparaît un homme qu’il est le seul à voir et à entendre. Celui-ci prétend être Ziya Hursit, l’homme qui fut pendu en 1926 pour avoir planifié l’assassinat d’Atatürk, considéré comme le « père de la nation » en Turquie. Le récit du quotidien du jeune appelé, confronté au froid et à l’hostilité de la population locale majoritairement kurde, est alors entrecoupé de celui de Ziya Hursit. Car ce dernier entreprend de raconter sa vie à la jeune recrue, déroulant sous ses yeux ses études en Allemagne, son enrôlement volontaire dans l’armée de Guillaume II durant la Première Guerre Mondiale, puis sa participation enthousiaste comme député au Parlement de la nouvelle République turque, avant la désillusion. Une question sous-tend le roman : est-ce cette voix qui transmet un peu de sa folie au jeune soldat, ou bien est-ce la solitude et le manque de sommeil de ce dernier qui le rend fou au point de lui faire entendre des voix ?
Un superbe roman qui convoque avec brio l’histoire tourmentée de la République de Turquie, tout en condamnant fermement le service militaire obligatoire toujours en vigueur dans ce pays.